La Dama Boba vous attend au Théâtre 13
Otavio, un riche seigneur madrilène a deux filles qu’il ne parvient à marier: Nise l’aînée est une érudite pleine de suffisance, quant à Finéa la cadette, elle n’a tout simplement rien dans la tête. Lorsqu’un oncle lointain cède sa fortune à l’une des filles, les galants se pressent à la porte des demoiselles : mais l’arrogance de l’une et la bêtise de l’autre repoussent à chaque fois les ardeurs de ces prétendants …
Une farce philosophique
Cette allègre pièce de Lope de Vega est une farce philosophique pleine de modernité. Écrite au XVIIe siècle, elle porte une réflexion subtile sur la position de la femme en tant qu’épouse mais surtout en tant qu’ « être pensant ».
Véritable pendant à L’Ecole des Femmes de Molière, cette comédie interroge aussi les spectateurs sur l’importance de l’amour qui peut transformer chacun d’entre nous et le rendre meilleur.
L’écriture de La Dama Boba est fine, drôle et pertinente, et l’on sait gré à Justine Heynemann d’avoir mis en scène ce texte pour nous faire redécouvrir ce grand auteur du Siècle d’Or espagnol.
L’adaptation de Justine Heynemann accentue volontiers la part hispanique et caricaturale de la pièce afin de nous faire rire. Certes, la teneur philosophique y perd un peu de sa puissance mais la trame est si amusante et c’est si bien interprété que l’on se laisse volontiers porter.
Nise et Finéa : deux coeurs à prendre
Dans le rôle de Nise l’Érudite, la comédienne Sol Espeche joue avec grâce et prestance les intellos. Derrière son air pédant et sa mine hautaine, cette jeune bourgeoise brule cependant d’amour pour Laurencio, un crève la faim prêt à la troquer contre meilleure fortune. Lorsqu’elle apprend que ce dernier courtise sa propre soeur, la jalousie la gagne : la sage Nise perd alors toute sa contenance et c’est un plaisir de voir Sol Espeche se transformer sur scène en une furie sensuelle et possessive.
A ses côtés, Roxanne Roux se pose en pauvre rivale dans le rôle de la cadette, Finéa. Perchée sur des talons de douze centimètres et affublée d’une robe rose bonbon, elle incarne les idiotes à ravir. L’oeil hagard et la parole absurde, cette charmante cruche ne parvient pas à apprendre l’alphabet et croit dur comme fer qu’elle doit épouser un homme tronc ! Cependant, grâce à l’amour qu’elle va soudainement porter envers Laurencio, sa sottise va peu à peu se dissiper et laisser paraitre une fort belle personne.
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Une flopée de galants qui paradent dans tous les sens !
Afin de courtiser ces séduisantes jeunes filles, la pièce met en lice une flopée de prétendants : il y a Laurencio bien sur, grand dadais pauvre et mollasson interprété avec humour par Antoine Sarrazin qui va même jusqu’à quémander quelques sous dans le public.
À côté de cet indolent poète, l’énergique Corentin Hot joue les valets en courant nerveusement sur toute la scène et en se mêlant à toutes les discussions.
On aime aussi la présence de Duardo (Pascal Neyron), ce seigneur courtois qui ne cesse de déclamer de confus sonnets en taquinant sa guitare.
Le beau Liséo (Rémy Laquittant) nous fait beaucoup rire avec ses grands airs aristocratiques et sa passion brulante envers Nise.
Enfin, on plaint secrètement le seigneur Otavio (Stephan Godin), père des deux donzelles indociles qui, de son côté, n’en peut plus de toute cette mascarade !
Amour, fortune et infortune
Tout est mené tambour battant par ces huit comédiens qui enchainent les saillies, les parades et se livrent successivement à des tours de chants en français et en espagnol. C’est fougueux, réjouissant, coloré. Dans cette histoire, on s’embrasse et on se désembrasse, on s’aime et on se trompe, on se chahute et on se rabiboche. La fin tire un peu en longueur mais l’on rit quand même de bon coeur tant ces artistes se donnent sans compter.
En quittant cette comédie pleine d’entrain, on se demande tout de même si les choses ont vraiment changé depuis le XVIIe siècle : comme le disait Lope de Vega « L’éclat de l’or a toujours plus d’attrait que l’esprit »… De nos jours, une riche imbécile éclipse encore de loin une érudite aussi belle soit-elle, non ?
Lucide ce Vega !
La Dama Boba – PDF SYMA News – Florence Ye?re?mian
La Dama Boba ou celle qu’on trouvait idiote
Félix Lopez de Véga
Justine HeynemannCie production du Sillon : Sol Espeche, Stéphan Godin, Corentin Hot, Rémy Laquittant, Pascal Neyron, Lisa Perrio, Roxanne Roux, Antoine Sarrazin
Comédie rusée
Théâtre 13
103 A Boulevard Auguste Blanqui – Paris 13e
Métro Glacière
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Du 15 janvier au 17 février 2019
Du mardi au samedi à 20h – le dimanche à 16h
Réservations : 0145886222
www.theatre13.com
La pièce dure 1h45
Traduction : Benjamin Penamaria – Scénographie : Thibaut Fack – Costumes : Madeleine Lhopitallier – Lumière : Aleth Deypere – Musique : Manuel Peskine
Photos : © Cindy Doutres