Don Juan est une femme : la nouvelle comédie d’Olivier Maille
Ne cherchez surtout pas Sganarelle, Doña Elvire ou le terrible Commandeur dans cette adaptation très libre de Don Juan. Le grand séducteur n’est ici qu’un prétexte pour ouvrir le débat sur l’égalité des sexes. En partant d’une répétition théâtrale entre cinq comédiens, cette pièce s’amuse en effet à caricaturer avec beaucoup d’humour le sempiternel conflit homme-femme.
Des répétitions qui tournent au vinaigre
Tout débute sur un plateau théâtral, le premier jour de répétitions. Pour des raisons qui lui sont propres, Isabelle, metteur en scène, a choisi de donner le rôle de Don Juan à Clémentine, sa meilleure amie. Face à ce choix qui détruit le symbole même de la séduction masculine, Pascal, un autre comédien, ne semble pas convaincu. Tandis que les textes sont distribués, Pascal s’insurge contre ce travestissement ridicule et accuse les femmes de vouloir sans cesse s’accaparer le pouvoir. Sous les yeux de Jean-Pierre, le producteur, et de Gabin, l’adorable accessoiriste, débute alors un règlement de comptes entre machistes et féministes.
Une belle pluie de préjugés sexistes
Entre trois crises, deux accusations et quatre câlins, la scène se transforme peu à peu en cabinet de psy pour une séance collective : les propos sexistes fusent, les clichés infantiles explosent et plus personne ne se concentre sur le texte. Semblables à de grands enfants, les cinq protagonistes se bombardent alors de préjugés où la femme devient une imbécile maniaque du ménage et l’homme un fainéant en rut de grande envergure.
Une troupe des plus dynamiques
Afin de donner vie à ces échauffés, la troupe de comédiens d’Olivier Maille s’égosille pour faire rire son public sur la scène du Café de la Gare !
C’est à Raphaëlle Lenoble que revient le rôle d’Isabelle. Vêtue de son gros pull et de ses petites lunettes, la demoiselle nous fait songer à une sainte nitouche mais elle a la fâcheuse tendance de s’envoyer en l’air avec tout ce qui passe. Marchant à voile et à vapeur, Isabelle n’est pas bien compliquée et elle se console avec sa boîte de vieux gâteaux quand rien ne se présente…
Tournant sans arrêt autour d’elle, Jean Pierre (Hubert Myon), son producteur, tente sa chance en finançant dévotement cette adaptation féministe de Don Juan. Tout petit et pas vraiment sexy, Jean-Pierre a le profil de l’éternel looser qui se rassure en achetant ses amis et ses maitresses d’un soir grâce à sa visa gold et ses comptes bancaires.
Dans un genre plus viril – mais tout aussi amusant – Pascal (Olivier Maille) joue les caïds et ment à tour de bras. Macho et de mauvaise foi, ce playboy pétri de mensonges prétend sans cesse faire de l’acting pour ne pas perdre la face devant ses camarades de scène.
À l’opposé de ce misogyne nerveux, le personnage de Gabin se déploie tout en féminité. A travers son rôle d’accessoiriste complètement à l’ouest, le comédien Mathieu Coniglio parvient à charmer l’ensemble du public (hommes et femmes confondus !) : la gestuelle maladroite et le regard timide, il déborde de nuances scéniques et nous fait songer à une fusion entre Bambi et Forest Gump !
Afin de clore cet excentrique quintet, Fanny Lucet nous livre quant à elle une représentante féministe des plus enragées. Sans cesse dans l’attaque, sa Clémentine est une jolie aguicheuse qui ne manque ni de panache ni de répondant.
Entre une sympathique nymphomane, un tendre bègue, une Femen très coriace, un macho-menteur et un producteur totalement en manque, cette pièce nous livre une brochette de personnages des plus croustillantes. Malgré leurs différences, leurs failles cachées et leurs contradictions, il est amusant de constater que tous ces protagonistes possèdent un point commun des plus évidents : ils sont tous en quête d’amour !
Don Juan est une femme
Mise en scene : Olivier Maille
Avec (en alternance) : Raphaëlle Lenoble ou Dorothée Moreau ou Eugénie de Bohent, Fanny Lucet ou Aurore Pourteyron, Olivier Maille ou Mathieu Mocquant ou Florian Spitzer, Hubert Myon ou Sébastien Perez, Mathieu Coniglio ou Günther Vanseveren
Café de la gare
41 rue du temple – Paris 4ème
Tous les vendredis et samedis à 21h
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