The show must go on. Tel est le mot d’ordre de la Japan Expo Sud pour son dernier jour, alors que le gouvernement vient d’édicter des mesures drastiques dans le cadre de la crise sanitaire. Coronavirus ou pas, Marseille ne lâche rien et accueille les festivaliers comme prévu.
Effet de ces annonces spectaculaires ou inquiétude plus générale, il n’y a pas de queue à l’ouverture. Tout le monde entre très rapidement, et le gens costumés sont proportionnellement encore plus nombreux.
Dans les allées, pas de bousculade, même en plein milieu de la journée. Le jardin japonais (un peu moins beau qu’à la Japan Expo Paris, il faut le dire) permet de faire une pause ou des photos.
L’artisanat japonais s’invite à la Japan Expo Sud
Ceux qui ne manquent jamais la Japan Expo, ce sont les commerçants. Les stands ont une fois de plus rivalisé sur les prix, le choix et la présentation pour convaincre les visiteurs venus faire du shopping. Washoku est un site qui agit à la fois dans le domaine des ressources humaines, mais aussi pour la promotion de l’artisanat japonais à l’étranger.
Son représentant M. Adachi a d’ailleurs amené avec lui une série de coupes pour boissons chaudes ou froides appelée Etena, et des gobelets à saké carrés typique (masu). Révisez votre budget à la hausse, car on est là dans le très haut de gamme : les prix varient entre 100 et 400€ pour un seul verre! Tous les produits sont fait main, dans la plus pure tradition de l’artisanat japonais. Les gobelets sont en étain, ce qui permet de garder la chaleur (ou la fraîcheur) du saké plus longtemps.
Si les objets en laque parsèment les expositions d’art classique liés au Japon, la noble matière produit un art bien vivant aujourd’hui. Parmi les contacts de M. Adachi, l’atelier Nakakado a su réinventer l’usage de la laque en y appliquant de nouvelles couleurs. Le mariage du noir originel au rouge modernise la production pour en faire des objets d’intérieurs très désirables, bien que l’on reste sur du haut de gamme destiné aux plus aisés.
Un showfloor en demi-teinte…
Déception sur le stand Le Sport dans les Manga et Animé : il n’est pas grand et ne contient que quelques courtes fiches sur moins d’une dizaine d’œuvres. On retrouve des animés plus ou moins connus (Captain Tsubasa, Haikyû) mais d’autres plus discrets comme Cynthia ou le Rythme de la Vie, un manga/animé des années 80 qui a pour thème la gymnastique. Le court synopsis laisse le visiteur sur sa faim, mais ce stand a au moins pour mérite de promouvoir des hits oubliés. Il manque toutefois un Suzuka (athlétisme) ou, plus proche de nous, Danbell Nan Kilo Moteru?, l’hilarant animé sur la musculation diffusé l’an dernier. Difficile de nier que la sélection aurait pu être plus complète.
Bonne surprise en revanche au stand FF Museum, ce collectif de passionnés des jeux de sociétés inspirés des RPG Final Fantasy. De nombreux jeux de cartes sont présentés, et en particulier ce jeu de Triple Triad en version physique. On rappelle que le Triple Triad est un jeu de cartes présent de Final Fantasy VIII sur Playstation, et très certainement l’un des meilleurs mini-jeux jamais conçu dans un jeu vidéo. Imprimé par Bandai en 1999 au Japon, cette version physique est proche de la légende urbaine tellement elle est rare!
… mais le cinéma ne désarme pas
C’est jour de conférence pour l’équipe du film Les Enfants du Mois de Kamiari. L’affiche avait piqué notre curiosité lors du Kyoto International Manga & Anime Fair, et nous avons aujourd’hui quelques détails sur le long-métrage. Issu du financement participatif (plus d’un million de yen récoltés), le film met en scène une petite fille du nom de Kanna, embarquée dans une aventure onirique. En effet, la légende dit que les huit millions de dieux shintô se réunissent en octobre à Izumo (préfecture de Shimane), et Kanna se retrouvera là-bas pour des raisons qui n’ont pas encore été révélées.
Le producteur M. Suwa est un grand de l’animation japonaise. Il a notamment dirigé les long-métrages des licences City Hunter et Détective Conan, rien que ça… D’autres grands noms de l’industrie devraient être annoncés dans les semaines à venir. Hélas, pas de bande-annonce à l’heure actuelle, le public marseillais doit se contenter des premières illustrations et des story-boards pour entrevoir les premiers indices sur le film. Les intervenants promettent toutefois davantage pour la Japan Expo Paris.
On finit avec The Dawn of Kaiju Eiga, la projection de clôture de cette Japan Expo Sud 2020. Très intéressant, ce documentaire retrace l’historique des films Godzilla, énorme réussite culturelle du Japon d’après guerre. Il montre que le film original de 1954 fut extrêmement influencé par la guerre atomique. A l’époque, le producteur Ishirô Honda compare les séquences de destruction de son film aux “paysages de fin du monde” qu’il a vu à Hiroshima.
Le premier Godzilla est un monstre qui a muté dans les océans suite à la prolifération nucléaire (il possède d’ailleurs un souffle atomique qui irradie Tokyo), mais il y a raison précise à cela. La vidéo précise qu’en 1954 justement, les essais nucléaires américains firent une victime collatérale : un bateau de pêcheurs japonais qui avaient pris la mer ce jour-là. L’équipage fut violemment irradié, ravivant le spectre de l’horreur nucléaire. Depuis lors, Godzilla constitue un message moral quant à l’utilisation du nucléaire : le monstre est vu comme un “messager” venu purger une humanité qui a dépassé les bornes. Malheureusement, la morale écologique s’est effacée au fil des années, à mesure que les impératifs commerciaux ont pris le pas.
The Dawn of Kaiju Eiga contient également beaucoup d’anecdotes amusantes, rapportées par les acteurs de l’époque : entre autres, Akira Takarada (qui joue l’un des héros) et Haruo Nakajima (l’homme dans le costume de Godzilla). On y apprend par exemple que l’équipe avait enregistré plusieurs animaux du zoo de Tokyo pour produire les rugissements de Godzilla, mais qu’aucun ne convenait. Au final, c’est une contrebasse largement modifiée qui fut utilisée. Bref, un documentaire génial que tout fan du Japon devrait porter à sa connaissance.