Jeanne d’Arc n’a laissé ni portrait ni tombe mais sa parole a traversé les siècles. Femme de foi et de courage, elle a inspiré la comédienne italienne Monica Guerritore qui lui a consacré une pièce intense et engagée, reprise pour la première fois en France par la magistrale Séverine Cojannot.
Le procès de Jeanne
L’action prend place en 1431 durant le procès de la Pucelle. Face à un tribunal grouillant d’évêques et de cardinaux, Jeanne, la paysanne, clame son innocence. Du haut de ses dix neuf ans, elle tente de leur faire comprendre les visions bienveillantes qui la hantent depuis des années.
Portée par ses voix, elle nous ramène dans son enfance, nous projette à la cour du roi Charles VII et nous transporte en pleine bataille d’Orléans.
Mi femme-mi guerrière
Parée d’un brassard et d’une jambière d’armure, Séverine Cojannot endosse ce rôle avec fougue et plénitude. Mi femme-mi guerrière, la comédienne passe de la dévotion divine à la révolte avec une alchimie remarquable. A la fois forte et fragile, elle décline la joie, la souffrance, le doute et nous livre une Jeanne pieuse mais farouchement volontaire.
Un christianisme charnel ?
Épée en main, on la voit en effet s’élever vaillamment contre cette terrible assemblée d’hommes qui condamnent son hérésie mais aussi sa place de femme non soumise. Car il faut le dire : aux yeux de ces ecclésiastiques misogynes, Jeanne symbolise un christianisme bien trop charnel. Malgré ses cheveux courts et ses habits d’homme, la Pucelle d’Orleans demeure une fille d’Ève qui n’a rien à faire sur des remparts et encore moins parmi les figures de l’église. Drôle d’ironie lorsque l’on sait que Jeanne a, par la suite, été canonisée et élevée au rang d’héroïne nationale…
Afin de mettre en avant le discours militant de cette sainte, Monica Guerritore a opté pour un décor minimaliste qui laisse place au texte : une simple poutre en guise de bûcher, quelques projections d’images antilibéralistes et une sélection de musiques héroïques amplifient à ravir la narration de Séverine Cojannot qui nous porte avec véhémence jusqu’à la condamnation finale.
Florence Gopikian Yérémian
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