Après avoir soulevé les foules autours de tubes fédérateurs, Boostee a toujours cette même envie de faire du bien au public. Un chanteur vif de retour pour réunir autour d’un nouvel univers plus épuré fruit de son évolution artistique et personnelle. Un adulte en construction de 25 ans connecté à son époque et ses maux, livrant un état d’esprit conscient et réconfortant à une génération d’êtres trop souvent « Jeunes et tristes ». Entretien.
« Mes albums ont toujours été le reflet de ce que je vis »
SYMA : Dans quel état d’esprit êtes-vous pour la sortie de ce troisième album ?
Boostee : Serein, excité et content. C’est un album important, le premier que je fais entièrement sur mon label. C’est un bel accomplissement.
Pour l’occasion vous avez remis votre compte Instagram à zéro, ça symbolise une envie de nouveau départ ?
Exactement. C’est un peu un renouveau, une suite d’aventure qui reste toujours la même mais j’ai eu envie de faire cette page blanche pour repartir et archiver le reste que je ne renie absolument pas.
Que retenez vous depuis vos premiers pas d’artiste ?
Instagram a retenu 8057 posts, ça fait beaucoup ! Mais j’en retiens avant tout une expérience incroyable, quelque chose de fort voire trop. Pour ça que j’ai préféré me mettre un peu de côté à un moment donné, j’avais envie de rediriger les choses sur moi, pour moi. J’en retiens du positif, des rencontres avec une communauté, du monde pour créer. L’objectif est de continuer à perdurer en respectant ce que je veux et la manière dont je veux avancer. Je voulais simplifier les choses en créant mon propre label et faire d’autres projets comme ma marque de vêtements, signer des artistes aussi..
Sur vos deux premiers albums vous alterniez paroles en français et anglais, cette fois les titres sont uniquement en français, pourquoi ce choix ?
Quand j’ai commencé la musique j’avais 13 ans je me referais aux artistes américains que j’écoutais avec mes parents. Forcément je ne connaissais que ça. J’ai découvert d’abord le rap américain j’ignorais que le rap français existait. Puis j’ai eu envie que les gens comprennent ce que je raconte, en aménagement mes couplets, puis mes refrains. Et naturellement je me suis retrouvé à faire uniquement du français.
Egalement on vous a connu d’abord lumineux et optimiste, puis un peu plus mélancolique. C’est un tournant cohérent avec votre état d’esprit ?
Le but c’est d’être sincère avec moi même. Quand on change de direction il faut prévenir le bateau en amenant les choses calmement à travers les clips, images… Mais j’ai toujours les mêmes valeurs, les mêmes envies de raconter quelque chose et cette note d’espoir. Mais j’évolue je grandis, donc normal de faire quelque chose de différent. D’autant que je n’ai jamais eu peur de casser les codes. Les gens kiffent lorsque ça évolue et que l’artiste leur propose de la sincérité.
Au départ vos tubes étaient plutôt légers, taillés pour chiller, ici on ressent plus l’envie de faire réfléchir le public ?
Il y a certains titres un peu plus sérieux, c’est normal. Mes albums ont toujours été le reflet de ce que je vis donc forcément quand j’avais 19 ans je n’avais pas les mêmes préoccupations. Après tu grandis tu as de nouvelles responsabilités.. ça reste mes pensées et parfois oui avec une forme de réflexion amenée
« Jeunes et tristes c’est un mood à un moment précis d’une vie »
Ce troisième album s’intitule « Jeunes et tristes ». Rimbaud disait « on n’est pas sérieux quand on a 17 ans » vous pensez que ce dicton est toujours d’actualité ?
Je pense que ça dépend ça ne veut rien dire, tout dépend de la vie de chacun. Tu peux aussi avoir des responsabilités et être adulte si tu n’as pas le choix. Pour ma part je l’ai été c’est sûr. « Jeunes et tristes » c’est un mood à un moment précis d’une vie. Quand on écoute l’album ça prend une autre proportion, c’est loin d’être péjoratif. Je me suis déjà senti triste dans un moment de bonheur, tu as cette nostalgie qui te prend. C’est ça, de l’amour, de belles choses qui s’arrêtent, cette découverte de la vie et des émotions. Un énorme feu d’artifice. Avec des choses qui naissent, qui meurent. On peut être triste à un instant T sans pour autant être déprimé.
Plus récemment Emmanuel Macron a prononcé ces mots « c’est dur d’avoir 20 ans en ce moment », vous le ressentez ?
Pour moi même non, je suis toujours optimiste je fais en sorte de ne pas l’être. Je comprends très bien un jeune d’aujourd’hui qui dit vivre la pire période de sa vie, à étudier à distance.. Pour ma part j’ai reçu des bonnes nouvelles…
Vous pensez que la crise sanitaire a malheureusement accentué le mal être des jeunes ? Et celui des jeunes artistes ?
C’est un fait oui. On voit bien qu’il n’y a plus d’activités extérieures, des études en virtuel. C’est dur, mais si ça repart on aura au moins la valeur des choses, on saura la chance qu’on a de revivre ces moments. Je dis ça depuis ma ferme, tranquille dans mon coin. Je n’aurais sans doute pas le même discours si j’étais dans la même situation que certains jeunes enfermés dans des petits appartements…
Vous pensez que les jeunes ne sont pas assez écouté, qu’il y a un manque de considération de la part des politiques et des plus anciens ?
Ce qui me dérange le plus c’est qu’on n’interroge pas les bonnes personnes, qu’on généralise beaucoup. Ça ne marche pas comme ça. Il y a eu un vrai laissé pour compte des lycéens, collégiens. C’est dur de continuer les études.. J’ai une grosse pensée pour ceux qui s’accrochent.
Vous pensez aussi qu’il y a un manque de modèles aussi ?
Peut-être. Je n’ai jamais été attaché à un modèle. De nos jours il y en a plein en tout genre… chacun essaye de se rattacher à quelque chose.
« Je ne prétends pas être un porte-parole pour qui que ce soit »
Si on vous dit qu’avec cet album vous êtes un peu un porte parole pour la jeunesse vous êtes d’accord ?
Pas du tout d’accord, je ne prétend pas être un porte parole pour qui que ce soit. Je suis là pour faire de la musique, de l’art essayer de me réconforter et si je peux d’autres âmes qui en ont besoin. Ça n’est pas mon rôle, je ne prétends pas trouver des solutions, je suis juste là pour divertir. Même si avec certaines chansons j’ouvre des débats, sur les réseaux sociaux on échange les points de vue. La musique est là aussi, pour soulever certains problèmes, en mettre en avant d’autres. Je parle du harcèlement scolaire, de l’avortement..
Vous pensez que c’est une manière de leur montrer qu’ils ne sont pas seuls ?
Pour moi c’est le rôle de la musique, unir les esprits, fédérer, créer un moment de vie fort et simple. Bob Marley il a chanté l’amour toute sa vie.. Je suis partisan du fait que chacun doit aider à son niveau.
L’album aborde beaucoup le sentiment d’abandon de la génération actuelle à la dérive, mais vous réussissez toujours à garder une note d’espoir, vous vous sentez malgré tout confiant pour l’avenir ?
Ça n’est pas calculé, je suis naturellement comme ça. Même quand je suis nostalgique ou je broie du noir il y a toujours une phare plus optimiste qui en ressort.
Dans le hit « Jeunes et tristes » vous dites même « Je sais qu’est qu’une question de temps, mais on agira en attendant ». De quelle manière ?
Grâce à la musique, au fait de faire les choses. Soit regarder le côté triste ou la seule porte ouverte pour essayer de faire quelque chose. C’est ce que j’ai essayé de faire et je suis sûr que plein de jeunes ont cette motivation. Ne pas se laisser abattre et continuer d’avancer malgré les galères.
Vous parlez aussi pas mal d’amour, vous pensez que c’est le remède pour ne pas sombrer ?
Oui c’est un peu ça.. en tout cas c’est un sentiment universel qui peut aider. Le bonheur est là quand il est partagé, et ça se rapporte souvent à l’amour qui nous forge. Les premières histoires.. et ça me touche et me parle. Je parle aussi de mes amis, de ma famille et de tout ce qui fait ce que je suis maintenant.
Dans « Ciel orageux » vous parlez de filiation. Vous songez à devenir père un jour ?
Ça n’est pas ma priorité du moment mais si la vie m’offre ce futur pourquoi pas…
On sent déjà dans vos textes de la sagesse et une envie de transmission plus que de colère. Quel est le message que vous voulez faire passer ?
Pas de message particulier à faire passer si ce n’est que j’aime profondément la musique, ma communauté, mon travail de faire un album qui vaut le détour et soit sincère. J’ai toujours pensé qu’en agissant comme ça d’autres doivent surement ressentir la même chose et se sentir concerné. J’ai toujours fonctionné comme ça. Mon rôle c’est que les gens aient un sentiment d’appartenance et ne se sentent pas seuls, faire du bien aussi.
Vous concluez votre album par le titre « Cherokee » où vous parlez des discriminations, ça prépare le public à la suite ? Vous allez faire des titres encore plus engagés ?
J’ai toujours fait des titres où je dis ce que je pense, je ne choisis pas des sujets tendances mais des choses qui me dérangent. Je ne fais pas ça pour faire évoluer le débat, quand ça le provoque c’est cool mais sinon c’est plus sur des thèmes qui me parlent.
Merci à Boostee
DROUIN ALICIA
Album « Jeunes et tristes » disponible