Barbara Pravi a pris le temps nécessaire pour couver et alimenter délicatement son nid musical. Un cocon libéré après des années de travail avec grâce et éloquence sous forme d’un premier album. Le message est clair « On n’enferme pas les oiseaux ». Une ode à la liberté et l’affirmation d’une artiste avertie jusque là en mal d’acceptation. Chronique musicale.

Barbara Pravi - On n'enferme pas les oiseaux - Saute -

Un élan vertigineux

Elle voulait qu’on l’écoute. Un vœux pleinement exhaussé avec la sortie de « On n’enferme pas les oiseaux ». Un titre qui en dit long sur les intentions d’émancipation de Barbara Pravi. Une image symbolique qui correspond bien à « la chanteuse à demi » dépeinte dés le départ dans son désormais incontournable « Voilà ». Une prise d’élan sous forme d’auto-portrait où l’ancienne serveuse de café y conte ses premières années de galères avant d’intégrer l’industrie musicale. Un beau pied de nez pour celle qui jusqu’à cette opportunité tant attendue peinait à se faire entendre et accepter. Un envol encore tout chaud pour cette voix lyrique au style traditionnel qui depuis plane au dessus des charts. Jusqu’à frôler même le sommet du concours de l’Eurovision 2021 où elle a terminé deuxième. Eloignant son passé crépusculaire d’un revers de voix depuis son présent où « Le jour se lève » enfin éclairé par un méli-mélo harmonieux de piano, cordes et choeurs. Un réveil en douceur donnant là le ton de ce disque délicat et élégant. Un projet orchestral orné de 11 pistes homogènes dont un « Interlude » de près d’1min30. Une carte visite taillée sur-mesure où l’artiste y dévoile toutes les facettes de son talent qu’on n’apprécie ou pas. Une amoureuse de la musique celle qui s’écoute avec attention, faite ici de nuances, arrangements soigneux classiques, jazzy et d’Orient parsemés de nappes de violon et piano. Une ambiance organique raffinée accompagnant magistralement ses textes poétiques. Un assemblage encore plus soigneux quand viennent se mêler ses interprétations théâtrales mais canalisées. Plus que de simples chansons de véritables histoires, les siennes, où elle savoure sa liberté à coup de quelques envolées lyriques rythmant entre autre « L’homme et l’oiseau ». Clamant aussi ses ambitions mais aussi ses failles avec une passion dévorante. Faisant valser cris du coeur et ballades plus légères sur le sentimental « Je l’aime, je l’aime, je l’aime » où elle laisse exalter son insouciance. « J’m’en fous je l’aime comme s’aiment les imbéciles heureux » murmure-t-elle à bout de souffle mais libérée.

Barbara Pravi - On n'enferme pas les oiseaux - Le jour se lève -

Hors de sa cage

Au-delà de sa propre personne, Barbara Pravi sort des barreaux pour plaide des sujets qui lui tiennent à coeur. À commencer par la cause de « La femme », une priorité pour cette personnalité engagée contre les violences conjugales. « Qui a décidé ce qu’est la femme ? Un bouton de rose, un brin de flamme, Aucun des deux ou bien tout à la fois » soulève-t-elle avec assurance. Prouvant fermement qu’elle n’est pas de celles qui se laissent manier comme des pantins par les dictats. Un tempérament explosif retentissant au creux de «La vague ». Un morceau tourbillonnant et sauvage échouant avec éloquence. Une chanteuse donc complexe à apprivoiser, un peu volage, indépendante mais si singulière qui ne demande qu’à se calmer. Une détermination portée par « Saute » qui se détache du reste de l’album sous ses accents orientaux d’avantage radiophoniques. Une battante pas bornée pour autant dédiant une douce déclaration aux hommes surnommés « Mes maladroits ». « Oh pour ça je vous aime, sans gêne mes maladroits » leur adresse-t-elle sans gêne ni rancune. Une œuvre complétée par le piano de « La ritournelle » sur la dureté qu’engendre une perte de mémoire. Avant que ne retentisse le bouquet final. Un disque s’achevant a cappella où elle referme ses bras habituellement si actifs lors de ses interprétations pour se recueillir dans la pénombre au son d’une «Prière pour rester belle ». Une ultime percée vertigineuse d’une artiste épanouie hors de sa cage.

DROUIN ALICIA