C’était l’heure de la revanche pour la Japan Expo, mise à terre par le COVID-19 pendant deux longues années. Alors que celui-ci court toujours bel et bien, l’enjeu pour le salon reposait sur sa capacité à ramener “le monde d’avant”. Le rêve a-t-il pu chasser les mauvais souvenirs?
Signe que les restrictions sont bel et bien derrière nous, les voyageurs se pressaient dès l’ouverture au vaste Parc des Expositions de Villepinte. Il n’y a guère de masques sur les visages, plus que dans les recommandations d’ailleurs. L’état d’esprit est clair : on est libre et on fait comme avant. Un parti pris optimiste pour le moins appréciable, et sûrement apprécié.
Des évènements qui reprennent doucement…
Notre premier rendez-vous concerne le tourisme. Le voyagiste Japan Experience (anciennement Voyageur au Japon) tenait une conférence sur ce sujet actuellement très épineux à l’intérieur et à l’extérieur de l’archipel. Autant le dire tout de suite, cette conférence fut décevante. Le sujet des restrictions à l’entrée du pays n’a tout simplement pas été évoqué. L’entreprise s’est bornée à donner des conseils généraux (quand partir, pour combien de temps, pour quel budget…) et n’est pas vraiment rentrée dans les détails. C’est probablement utile pour ceux qui n’y ont jamais voyagé, mais ça ne fait pas vraiment avancer le Schmilblick.
La scène Yuzu avait une programmation imposante centré le film Les Enfants du Mois de Kamiari. Comme promis, l’équipe du film était au complet pour faire l’exégèse du long-métrage. On apprend par exemple la signification du titre du film, liée à l’histoire antique d’Izumo. Mais les organisateurs avait gardé une petite surprise pour le public en la personne de Miwa. La chanteuse du thème principal de l’animé est venue en personne donner ses impressions, et raconter comment elle est arrivée sur le projet. La conférence se finit par une splendide performance de la chanteuse. De quoi ravir le public.
Le film était ensuite projeté intégralement, bien qu’ayant manifestement des problèmes de piste son. Les Enfants du Mois de Kamiari est un animé centré sur l’enfance et ses turpitudes. La jeune Kanna se voit embarquée un peu malgré elle dans un voyage mystique consistant à rencontrer les kami (divinités) de chaque région afin d’y recueillir un mets à rapporter à la réunion des dieux à Izumo. Pour un film qui joue sur les sentiments, Les Enfants du Mois de Kamiari manque d’expressivité : le travail sur les plans de caméra est insuffisant, tout comme l’ambiance sonore (peut-être est-ce dû aux problèmes techniques) ou les voix. L’animation trop quelconque ne permet pas de dégager des scènes fortes, pas plus que le charisme (absent) des personnages secondaires. La maturation de Kanna par rapport à la mort de sa mère ne convainc pas, et l’absence d’épilogue est fautive. N’est pas Ghibli qui veut, hélas…
…mais du jeu vidéo à gogo!
L’espace jeu vidéo est une partie toujours incontournable de la Japan Expo. miHoYo a vu grand cette année avec trois jeux sur son stand. Genshin Impact et Honkai Impact 3rd déjà disponibles, et Honkai Star Rail qui ne l’est pas encore. Paradoxalement, c’est Genshin Impact qui avait de loin le plus de queue, et les cosplayers sur ce thème était très nombreux.
Mais c’est évidemment le troisième titre qui va nous intéresser. Honkai Star Rail était jouable sur tablette dans une version assez avancée : 23 personnages 4 et 5 étoiles était pré-chargés et on pouvait constituer son équipe comme on le voulait. Contrairement aux précédents jeux miHoYo, celui-ci propose des combats au bon vieux tour par tour. Les fans de longue date de jeux de rôles japonais s’en féliciteront sans doute. Les commandes sont pour l’instant assez simples avec attaque et attaque spéciale, la démo ne laissant pas entrevoir de mécanique de gameplay novatrice comme Genshin Impact. Le jeu est en revanche magnifique en combat, tout en 60 images par seconde. Les couleurs et les animations sont un bonheur pour les yeux. La ville visitée était cependant un peu étroite, il faut espérer que l’univers en lui-même soit beaucoup plus grand. Honkai Star Rail possède déjà des combattants bien classes, ça serait dommage qu’il se loupe sur le reste.
Comme annoncé, Capcom était venu avec Street Fighter 6 jouable sur PS5. Le titre est fluide et élégamment coloré. On sent tout le travail de design et d’harmonie des couleurs derrière. Quant au mode de contrôle “moderne”, il paraît effectivement plus confortable que le mode classique, mais Street Fighter 6 n’en devient pas pour autant aussi intuitif qu’un Tekken ou un Dead or Alive par exemple. Même dans ce mode simplifié, les combinaisons de boutons ne sont pas simples à comprendre. Même si les combos sortent plus facilement, on sent que c’est un peu hasardeux. Classique ou moderne, Street Fighter 6 est un jeu de combat beau mais qui exigera probablement pas mal d’investissement.
Sega lui est venu avec Hatsune Miku Project Diva Megamix+, la version PC largement enrichie du jeu Switch. En réalité, c’est de facto le Project Diva Future Tone de la PS4 avec le style graphique de la version Switch en plus. Cette version était d’ailleurs jouée avec des DualShocks 4, la boucle est bouclée. Project Diva Megamix+ tournait sur des unités centrales custom pensées pour l’occasion, et le jeu de rythme était impeccable. Le test de cette mouture arrive très bientôt.
Yuji Kaida était venu éclairer le public sur sa carrière et son travail. L’illustrateur spécialisé dans les Kaiju (monstres géants) explique que bien qu’il ait travaillé au pinceau pendant plus de vingt ans, l’art digital lui permet d’être plus flexible avec ses clients. Ceci dit, il a fallu attendre bien des années avant que les ordinateurs deviennent assez puissants pour concurrencer le dessin papier. A défaut d’une rétrospective complète de sa carrière (qui aurait été souhaitable), l’artiste livre tout un tas d’anecdotes : son attachement au Godzilla de 1954, sa rencontre émouvante avec Spielberg sur Ready Player One (dont il a fait l’affiche japonaise) et ses débuts dans le jeu vidéo.
Avec le boom des premières consoles, les illustrateurs étaient très recherchés pour faire les boîtes de jeu. C’est ainsi que M. Kaida a réalisé celle de l’iconique Daimakaimura (Gouls and Ghosts). Il avoue que le modèle pour dessiner la princesse au dos était en fait… sa femme! Une bonne conférence mais qui aurait mérité d’être bien plus documentée.
On n’oublie pas bien sûr le shopping. La Japan Expo est un énorme moteur de chiffre d’affaires, des tonnes et des tonnes de produits sont disponibles à commencer par les figurines. De Hatsune Miku à Rising of the Shield Hero, il y en a pour toutes les envies et toutes les bourses (de 30 à plus de 300€). Difficile de ne pas trouver son bonheur car toutes sont en vitrine afin que le public puisse en vérifier la finition. C’est clairement le meilleur endroit pour en acheter une.
D’autant qu’on parle là vraiment de montagnes de figurines. Certaines sociétés d’import avaient deux, trois voire quatre stands dans tout le salon et des stocks monumentaux! C’est dire combien le marché a gonflé en quelques années.
Il y a même des précommandes pour les plus récentes. Le stand Good Smile proposer déjà ses figurines à sortir cet automne, comme Eldegard et Bernadetta de Fire Emblem Three Houses.
Mais cette année, il n’y en avait pas que pour les geeks car les organisateurs avait prévu une aire dédiée à l’artisanat traditionnel nippon. Furoshikis, masques kistune, calligraphie… d’innombrables œuvres magnifiques s’offraient aux yeux, et au portefeuille, des festivaliers. L’occasion rêvée de japoniser son intérieur vu la pléthore de décorations murales superbement illustrées avec des idéogrammes, des dragons, etc. Une excellente idée pour satisfaire un public toujours plus large.
Même si la programmation des conférences et des projections impressionnait moins qu’en 2019, ce fut quand même un retour extrêmement excitant de la Japan Expo après deux années blanches. Une myriade de stands intéressants, un hall jeu vidéo à la hauteur, des expériences gastronomiques, beaucoup de bonne humeur et un vrai paradis en matière de shopping. La Japan Expo a redémarré un succès. Il ne lui reste plus qu’à accélérer dans ce sens et à transformer l’essai à Marseille.
Japan Expo 2022
Parc des Expositions Paris Nord Villepinte
ZAC Paris Nord 2, 93420 Villepinte
Du jeudi 14 au dimanche 17 juillet 2022