Passer du métro à Bercy, c’est le rêve de THAYS. Une jeune artiste indépendante déterminée et débrouillarde qui déambule pour l’heure dans les rues de Paris à bord d’un camion aménagé, sans jamais lâcher du regard son objectif de réussite. Entretien.
« Une nuit j’ai fait un rêve où j’étais à Paris dans un camion, et je faisais tout pour me faire connaître dans la musique. Un matin j’ai été voir ma patronne pour annoncer ma démission »
SYMA : Pour ceux qui ne te connaissent pas peux-tu te présenter en quelques mots ?
THAYS : Je m’appelle Thays, j’ai 25 ans et je suis chanteuse.
Comment est née ta passion pour la musique ?
J’ai commencé à faire des spectacles devant mes parents à l’âge de 9 ans avec mes frères et sœurs, je prenais le pied de micro et je chantais. Ensuite à chaque fois qu’on allait en sortie et qu’on passait devant une scène j’avais tout le temps cette envie de monter dessus pour chanter, c’était plus fort que moi. Au culot j’allais demander. Par la suite je me baladais toujours avec une clé USB sur moi avec des musiques pour chanter. Puis je me suis lancée dans des castings. Ce qui me plaisait c’était vraiment de transmettre des émotions, de partager cela avec le public, de donner du bonheur aux gens.
Quand as-tu décidé d’en faire ton métier ?
J’ai toujours dit à ma mère que j’en ferais mon métier. J’ai quand même été jusqu’au BAC puis j’ai fait un CAP petite enfance et en milieu rurale parce que ma mère voulais que je garde la musique comme passion mais que je trouve un travail malgré tout. Donc j’en ai trouvé, j’ai fait du service à la personne pendant sept ans avant de finalement tout arrêter. Il y a un an et demi j’ai décidé de tout quitter. Une nuit j’ai fait un rêve où j’étais à Paris dans un camion et je faisais tout pour me faire connaître dans la musique. Un matin j’ai été voir ma patronne pour lui annoncer ma démission. Je pense que l’équipe était dégoutée mais m’a toujours soutenu dans ma passion. Puis je me suis mise à chercher un camion pour l’aménager et partir sur Paris de dormir dans les rues en camion, sans chauffage, sans douche et de chanter dans les rues tous les jours jusqu’à temps de me faire connaître.
Pourquoi ne pas avoir essayé de percer d’abord en province ?
J’ai essayé d’abord à Nantes mais personne ne s’arrêtait, il n’y avait rien. Je me suis dit qu’à Paris c’est là où tout se passe, il y a le métro, beaucoup de passage, de producteurs et d’émissions TV. Je me suis dit que c’était l’idéal pour me faire repérer.
Tu as tenté de nombreux castings de télé-crochets qui n’ont malheureusement pas aboutis, à ton avis qu’est ce qui t’a manqué ?
Malheureusement je n’ai eu que des petits commentaires que j’appliquais plus jeune. Puis au fur et à mesure on est tellement à se présenter qu’on nous dit rien, les équipes n’ont pas le temps. Donc on est obligé de s’auto-critiquer et d’essayer d’avancer seule.
« J’ai enregistré mon premier album dans ma chambre, puis j’en ai produit 1000 et j’ai démarqué des points de vente pour les écouler »
Tu poursuis donc pour l’heure ton parcours en totale indépendance, quelles sont les avantages et inconvénients ?
J’ai toujours fonctionné comme ça et j’aime bien parce que c’est moi qui décide. Par contre je me suis entourée de personnes qui me donnent des conseils, des compositeurs, des garçons que j’ai rencontré dans le métro qui me donnent accès à leur studio d’enregistrement.
Tu as réussi malgré tout à sortir ton premier album « évasion », comment l’as-tu conçu ?
Pour le financer j’ai vendu une grosse caméra professionnelle que j’avais pour réaliser mes clips. Je l’ai enregistré dans ma chambre, puis j’en ai produit 1000 exemplaires et j’ai démarqué des points de vente pour les écouler.
Tu as un mode de vie insolite puisque tu vis dans un van aménagé encore une fois par toi-même !
Je l’ai aménagé avec l’aide d’un ami. Malheureusement je n’avais pas vu en l’achetant que tout le dessous était abîmé. Le chassie est mort, troué et très dangereux. Je vais devoir enlever tout ce que j’ai pour pouvoir l’emmener en réparation pendant un mois. Pour financer ça je vais devoir aller chanter tous les jours dans le métro au lieu de quatre fois par semaine et dormir à droite à gauche. J’ai peur parfois quand je dors dedans. J’essaie toujours de me mettre devant un endroit sécurité, devant des maisons.. J’ai des alarmes dans mon camion que j’active si j’entends un bruit suspect. Je sais que c’est quand même dangereux ce que je fais.
« Chanter dans le métro est un exercice que j’adore, malgré les conditions difficiles »
A quoi ressemble une de tes journées types ?
Trois fois par semaines je vais courir au réveil. Puis je fais des échauffements pour ma voix, avant de partir chanter dans le métro environ 4H d’affilées. Le soir j’ai un réchaud pour manger et pour me laver je vais souvent dans des piscines.
On dit que jouer dans le métro est un exercice formateur, comment fais-tu pour attirer l’attention des passants ?
C’est une super bonne école, parce que les gens ne se retournent pas. Ça fait travailler sur tout, déjà le fait de chanter tous les jours la voix change. J’apprends.. Et au fur et à mesure la magie opère, il y a des sourires, des gens qui ont passé une mauvaise journée qui repartent avec le sourire. Ça c’est incroyable de pouvoir donner cette bonne humeur. C’est un exercice que j’adore malgré les conditions difficiles. La saleté, les odeurs, ça résonne beaucoup.. mais il y a plus de positif malgré tout.
Pour s’y produire il faut des autorisations, les places sont là encore chères ?
Il faut passer un casting. On est 1500 et ils n’en retiennent que 300. Un casting difficile à renouveler tous les six mois. Pour le moment je l’ai réussi deux fois, dans un mois j’y retourne pour pouvoir continuer.
« Je ne rentrerai pas tant que je n’aurai pas réussi, malgré tous les obstacles »
Quelle limite t’es tu fixée pour réussir ? Et quel délais ?
Non aucune. Si j’ai 80 et que je suis encore dans mon camion je continuerai à chanter quand même. Là encore j’ai envoyé des candidatures à des castings, j’attends les réponses.
Comment essayes-tu de te démarquer ?
J’aimerai m’imposer en faisant des chansons électros en français, parce qu’il y a plus d’anglais dans ce domaine.
Il y a des moments où tu as envie de tout abandonner ?
Non, je sais que je ne vais pas abandonner ! Je ne rentrerai pas tant que je n’aurais pas réussi, malgré tous les obstacles. On verra ce que l’avenir me réserve. Je ne me projette pas, je vis au jour le jour puis on verra ce qui m’arrive. En tout cas moi je ferais tout pour y arriver !
Quel est ton objectif ?
Ecrire des chansons, monter sur scène. Là je commence par des petites, j’aimerai bien arriver jusqu’à Bercy ! Voir des affiches de moi partout en France avec mon nom de scène, ça serait une belle victoire. Là je pourrais me dire que j’ai réussi, que ça y est j’ai eu ce que je voulais. Pour ensuite continuer et aller toujours plus haut.
Merci à THAYS
Premier album « Evasion » disponible
Un élégant mix de beats palpitant au rythme de tourments sentimentaux.
DROUIN ALICIA