Pas spécialement en avance, le Syndicat des Editeurs des Logiciels de Loisirs (SELL) nous livre enfin les données détaillées de l’économie du jeu vidéo en France en 2022, deux mois après les anglo-saxons.
Pour l’organisation, le petit recul de 1,6% du marché hexagonal (toujours à 5,5 milliards d’euros sur l’année) est une victoire dans “un contexte économique et énergétique difficile”. L’inflation galopante fait baisser la demande en bien non-essentiels, mais le jeu vidéo a su s’en défendre grâce à “une offre diversifiée et marché hardware au fort potentiel”. En réalité et en l’absence de réelle récession, le marché du jeu vidéo n’excelle pas spécialement par rapport au reste : le marché du livre a par exemple évolué dans les mêmes proportions.
Le PC en force
Il y a un phénomène de vases communicants assez intéressant ici, puisque l’écosystème console baisse de 6% et celui du PC augmente de de presque autant. Le PC efface donc sa baisse de 2019, signe que l’offre a progressé. Point noir de la période, les ventes de consoles cèdent 10%, tandis que les ventes de jeux gagnent 6%. Cela reflète le plus grand parc installé de PS5 et de Xbox Series, mais aussi la faible disponibilité de ces machines sur plus d’un semestre. Le chiffre d’affaires des consoles est encore largement majoritaire en France : 46% de la richesse contre 28% pour le PC et 26% pour les smartphones. La part du business physique se maintient à un bas niveau, soit 18% de l’ensemble. En France, il se vend toujours un peu plus de jeux complets physiques que de jeux complets dématérialisés sur console, mais l’importance du contenu additionnel (DLC, micro transactions et abonnements totalement dématérialisés) relativise cette comparaison.
Le top des ventes annuel de jeux consacre une nouvelle fois FIFA. FIFA 23 survole le reste du marché français avec plus de 1 700 000 ventes. C’est également le seul jeu à réaliser plus de 100 millions d’euros de recettes. Call of Duty Modern Warfare II confirme son lancement démentiel : le titre d’Activision est confortablement deuxième des ventes de jeux vidéo en France en 2022 avec presque 800 000 ventes et 58 millions d’euros de recettes.
Enorme année pour la licence Pokémon, vu que deux épisodes majeurs sont sortis dans la même année. Légendes Pokémon Arceus totalise frise les 600 000 ventes et Pokémon Violet et Ecarlate combinent 717 000 versions physiques vendues dans l’hexagone. Les jeux Pokémon ont généré quelques 63 millions d’euros de chiffres d’affaires, pratiquement quatre fois plus que Switch Sports, la nouveauté Switch la mieux placée derrière lui.
Nintendo peut d’ailleurs se satisfaire d’occuper à lui tout seul la moitié du top 20. Mario Kart 8 Deluxe, Mario Party Superstars ou encore Animal Crossing New Horizons ont continué à se vendre très largement en 2022 avec toujours de nombreux utilisateurs pour la console hybride. D’autres exclusivités majeures de 2022 ont eu du succès, nommément Switch Sports, Mario Strikers, Splatoon 3 et Kirby et le Monde Oublié, mais ce sont tous des jeux familiaux. La firme n’a toujours aucun poids sur le marché des core gamers.
Public que Sony en revanche a particulièrement convaincu l’an dernier : ses trois exclusivités God of War Ragnarok, Horizon Forbidden West et Gran Turismo 5 sont aux portes du podium avec environ 25 millions d’euros de recettes chacun. On note enfin la bonne tenue d’Elden Ring, qui avec un peu plus de 20 millions d’euros de recettes est dans le top 10. Il est plaisant de voir que ce chef-d’œuvre de l’heroic fantasy a trouvé son public aussi dans l’hexagone et c’est mérité.
Une sociologie française plutôt floue
Les jeux vidéo sur smartphone ont généré 1415 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022 en France. C’est stable par rapport à 2021 mais d’un autre point de vue cette économie semble avoir atteint un plafond de verre depuis trois ans. Le modèle, en manque de renouvellement, a vraisemblablement calé. Il est assez amusant de constater que les micro transactions constituent la quasi-totalité (97%) des revenus et les applications payantes seulement 1%. Le top des téléchargement ne brosse pas un portrait hardcore de l’utilisateur lambda, avec des titres plutôt légers comme Candy Crush Saga ou Subway Surfers. Il aurait été intéressant d’avoir un classement par volume de micro transactions en valeur, mais ce n’est pas dans le rapport.
Sur le profil des joueurs, le SELL annonce que 7 français sur 10 de plus de 10 ans jouent au moins occasionnellement, soit environ 37 millions de personnes. Un quart des interrogés disent jouer tous les jours, soit quand même 14 millions de français! Toutefois, l’étude ne précise pas les supports en question, ce qui aurait été souhaitable car allumer son téléphone pour jouer dans les transports ne constitue pas du tout la même pratique que dévorer des grosses productions consoles tous les jours. On restera sur sa faim sur cette analyse, en attendant d’en savoir peut-être plus l’an prochain…