La vie de ma mère : une question d’amour ou de devoir ?
Pierre est fleuriste à Paris. Aidé de son jeune associé, il passe son temps entre Rungis et sa petite boutique à négocier le prix des tulipes et vendre des bouquets de roses. Célibataire, aimable et honnête, ce trentenaire s’occupe aussi de sa grand-mère et tente de joindre les deux bouts jusqu’au jour où sa mère Judith réapparait dans sa vie : après deux ans de calme bien mérité, ce tsunami maternel va chambouler toute l’existence de Pierre et l’entrainer dans une course folle.
La bipolarité au quotidien, vous connaissez ?
Avec ce premier long-métrage, le réalisateur Julien Carpentier soulève le sujet délicat de la bipolarité. Traité sur le mode d’une tragi-comédie intimiste, son film montre la complexité des relations entre un fils et une mère atteinte de ce trouble psychique. À travers le tandem explosif interprété par Agnès Jaoui et William Lebghil, il interroge les spectateurs en faisant autant appel à leur raison qu’à leur sensibilité : Comment peut-on vivre avec un être bipolaire ? Comment ne pas se laisser détruire et manipuler surtout lorsque l’on aime la personne ? Comment, enfin, se décider à placer cet être cher mais malade dans un milieu médical sans culpabiliser ?
Une relation mère/fils entre amour et rancœur
C’est à Agnès Jaoui que revient le rôle de Judith. Bien qu’un peu trop théâtrale, elle prend son personnage à cœur et s’investit pleinement.
Pourvue d’un fort tempérament, la comédienne incarne une mère fantasque, allumeuse et borderline aux humeurs perpétuellement changeantes : oscillant entre des moments d’euphorie et des phases dépressives, elle fait vivre un calvaire à sa famille et particulièrement à son fils.
Ce dernier est merveilleusement interprété par William Lebghil : paré d’une simplicité désarmante et d’une grande maitrise émotionnelle, il insuffle à son protagoniste une véritable beauté intérieure et beaucoup de pudeur.
Derrière le calme apparent qu’il profile face à cette mère qui le ronge, William Lebghil laisse percevoir un amour filial, une sensibilité d’homme et des questionnements de tuteur.
Un regard nécessaire sur l’impuissance des familles face aux troubles psychiatriques
Même si certains passages du film sont parfois longs ou excessifs, Julien Carpentier nous touche par sa tendre lucidité et pointe du doigt un sujet qui s’étend au-delà de la pathologie bipolaire : comment continuer à vivre lorsque l’on vient de faire interner sa mère dans un hôpital psychiatrique ? Triste dilemme mais il faut en parler car beaucoup de familles restent impuissantes face à ce type de maladies et se laissent dévorer par la culpabilité. Après tout, ce n’est pas dans la logique des choses qu’un enfant devienne trop tôt responsable de ses parents …