La passion selon Béatrice Dalle
Amoureux de Pasolini, Béatrice Dalle et Fabrice du Welz ont fait fusionner leur passion pour donner naissance à une œuvre cinématographique où le destin du cinéaste maudit chaloupe poétiquement avec un portrait intime de la comédienne.
Sur les traces de Pasolini
Oscillant entre l’éloge et le documentaire, ce film atypique suit les traces de Pasolini en promenant le spectateur du Nord au Sud de l’Italie. De Rome à Ostia en passant par Venise, Béatrice Dalle se transforme en évangile dont la parole nous entraine dans les pas complexes du messie pasolinien.
Envoutée par le charisme et le talent de cet artiste hors-normes, Béatrice mystifie son fantôme tout en cherchant à comprendre son génie. A la fois dramaturge, acteur et réalisateur, Pasolini a longtemps été perçu comme un véritable diable à la sexualité débridée. A travers une palette de rencontres impromptues, Béatrice Dalle fait cependant ressortir l’engagement de cet intellectuel contre l’injustice ainsi que sa critique contre le consumérisme et la classe bourgeoise dirigeante.
Croisant les chemins d’un archiviste ou d’une co-scénariste en compagnie du jeune acteur Clément Roussier, on la retrouve aux côtés d’Abel Ferrara qui lui décrit à quel point Pasolini était détesté par le gouvernement italien pour son activisme communiste et son homosexualité avec de très jeunes garçons.
Béatrice Dalle touchée par la grâce
Eblouie par le talent de Pasolini, Béatrice semble lui pardonner ses fautes et préfère se concentrer sur l’amour du cinéaste envers les humbles. Subjuguée face au film qu’il a consacré à Jésus (L’évangile selon Saint Matthieu), on la voit pleurer toutes les larmes de son corps tant l’émotion la submerge. Mystique et presque possédée, elle s’offre ainsi sans fard à la caméra de Fabrice du Welz qui la madonise dans un noir et blanc de soie enveloppé de concertos vivaldiens.
Lorsque l’on connait la gouaille et la force de caractère de Béatrice Dalle, on est extrêmement touché par l’hypersensibilité qu’elle dévoile à l’écran. C’est de l’amour qui jaillit de ses tripes, de l’admiration sans faille pour le Maestro mais peut-être également un flux de douleurs et un appel à la beauté demeurés trop longtemps enfouies en elle. De toute évidence, la comédienne ne joue plus car Pasolini et sa poésie la bouleversent jusqu’au fond de l’âme. À mi-chemin entre une amante impossible et une Mater Dolorosa, elle est transcendée par ce voyage qui la rapproche d’un fantôme tant adulé et qui prend sur la fin des allures de Chemin de croix.
Lorsque la caméra de Fabrice du Welz s’arrête, on se dit que Béatrice a reçu la grâce lors de ce tournage… à moins qu’elle ne l’avait déjà, dissimulée durant des années sous sa carapace de rebelle.
Florence Gopikian Yérémian – florence.yeremian@symanews.fr
En complément : Interview exclusive Béatrice Dalle & Fabrice du Welz
La passion selon Béatrice
Un film de Fabrice du Welz
Avec Béatrice Dalle, Clément Roussier, Abel Ferrara
Au cinéma le 20 novembre 2024
La passion selon Béatrice a été projetée lors du Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg 2024 en séance spéciale
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