Olga de Amaral : l’art textile sous toutes ses coutures

Jusqu’au 16 mars, la Fondation Cartier présente la première grande rétrospective d’Olga de Amaral. Née à Bogota en 1932, cette artiste colombienne est une pionnière de l’art textile qu’elle a choisi d’explorer sous toutes les coutures. A travers 80 œuvres expérimentales, le visiteur est transporté dans une architecture de matières et de techniques singulières reflétant avec richesse le parcours de cette figure emblématique du Fiber Art. 

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Une inventivité monumentale

La mise en scène de l’exposition conçue par Lina Ghotmeh tient autant de la magie que de la narration. Au rez-de-chaussée de la Fondation Cartier, cette architecte d’origine libanaise a choisi de marier les toiles suspendues d’Olga de Amaral à des éléments rocheux et minéraux disposés à même le sol.

D’un ouvrage à l’autre, le visiteur a ainsi l’impression de se promener dans des paysages mystiques, de confronter de grandes voiles tressées ou d’être happé par des coulures de tissus déversant à ses pieds leur écume cotonneuse.

Composés dans des teintes ocres et brunes, les panneaux d’Olga de Amaral nous font songer à d’immenses toisons d’or ou à des cordages de bateaux qui se nouent en œuvre totémique. En laissant vagabonder notre imagination, on finit même par apercevoir sur certaines compositions les tuiles des toits de Bogota réfléchissant les rayons mouvants du soleil levant.

Olga-amaral-syma-news - exposition -fondation-cartier-gopikian-yeremianUne approche sacrée et poétique de l’art textile

L’exposition est lumineuse, grandiose, scintillante. On y perçoit une proposition de dialogue visuel et une invitation à déambuler dans un dédale de textiles où l’on se perd volontiers.

Au fil des multiples séries qui sont représentées (Brumas, Alquimias, Estelas…), on capte avec émerveillement tout le travail et l’inventivité d’Olga de Amaral.

Il en va ainsi de sa maitrise des différentes textures et de ses nuances chromatiques sans parler de ses audaces artistiques : d’une création à l’autre, on l’imagine nouant ses lianes multicolores, sculptant toutes sortes de fibres ou entremêlant des centaines de fils qu’elle n’hésite pas à enduire de gesso et à recouvrir d’acrylique !

Partant de quelques bouts de tissus, Olga de Amaral réussi ainsi à créer un monde ouaté et enveloppant où l’élégance côtoie sans cesse le sacré. Il faut dire que la feuille d’or fait partie des matériaux de prédilection de l’artiste et qu’elle confère effectivement à ses compositions des effets de lumière émanant du divin.

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Le textile comme langage

Outre l’usage de l’or, Olga de Amaral utilise le lin, le crin de cheval et parfois même le plastique qu’elle tisse, tresse et noue avec délectation. Le sous-sol de la Fondation Cartier entraine les visiteurs dans cette exploration intime et inattendue du textile.

Entre des œuvres aux accents précolombiens, ces salles plus intimes présentent de grands châles aux pointes effilées, des patchworks aux couleurs délavées ou des panneaux couverts de sequins bleus et dorés ressemblant à de grandes portes damassées.

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L’une des œuvres les plus hypnotiques de l’exposition est un agencement de pièces aux teintes cuivrées qui semblent en lévitation : disposées autour d’un cercle concentrique, ces stèles de tissus martelé nous font songer à d’immenses papyrus antiques voir même aux mégalithes surnaturels de Stonehenge.

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Entre les paysages tissés, les compositions de couleurs et les nuances de matières, on a envie de méditer, de palper et de laisser nos yeux se perdre autant que nos pensées.

En quittant l’exposition, on est étonné de voir à quel point des œuvres textiles peuvent transmettre autant de beauté et de spiritualité. Si, comme le dit Olga de Amaral, chaque fil est un mot, l’ensemble des explorations artistiques de cette grande dame font d’elle une superbe conteuse !

Florence Gopikian Yérémian –  florence.yeremian@symanews.fr

Olga-amaral-syma-news - exposition -fondation-cartier-gopikian-yeremianOlga de Amaral

Fondation Cartier

261 boulevard Raspail – Paris 14e

Jusqu’au 14 mars 2025

 

 

Florence Gopikian Yérémian est journaliste culturelle. Rédactrice auprès de Muséart, Paris Capitale, L’Oeil ou le BSC News, elle couvre l’actualité parisienne depuis plus de vingt ans. Historienne d’Art de formation (Paris Sorbonne & Harvard University), correspondante en Suisse et à Moscou, elle a progressivement étendu ses chroniques au septième art, à la musique et au monde du théâtre. Passionnée par la scène et la vie artistique, elle possède à son actif plus de 10000 articles et interviews.