L’Affaire Courteline
« Amusez-vous ! » Telle est la devise de cet allègre spectacle mettant en scène sept courtes pièces de Courteline. Contemporain d’Eugene Labiche mais surtout de Feydeau, Georges Courteline fait partie des grands maîtres du vaudeville français. Tournant au ridicule l’hypocrisie des bourgeois et le monde étriqué des petits fonctionnaires, cet auteur satyrique a composé de nombreuses nouvelles et une multitudes de pièces en un acte.
Courteline : croqueur des moeurs de son temps !
La compagnie de la Boîte aux Lettres – que nous avons déjà croisée la saison dernière dans Le jeu de l’amour et du hasard – a sélectionné quelques saynètes pour tenter de les remettre au goût du jour.
Durant une heure vingt, six comédiens fort inspirés se régalent donc à interpréter une singulière galerie de portraits signés Courteline. Parmi ces clichés de la fin du XIXe siècle se distinguent un administrateur alcoolique houspillé par son directeur, une mère autoritaire et son fils un peu gauche, un vieux couple qui ne cesse de se chamailler, des maris trompés à la pelle ainsi que toute une palette de bourgeoises guindées et infidèles pestant à foison après leurs pauvres bonnes.
Une troupe vaudevillesque !
Dans cette adaptation de Bertrand Mounier, les scènes sont inégales, parfois chaotiques, un brin absurdes mais toujours fantaisistes et pleines d’entrain. Avec Courteline, il faut savoir que l’on frôle sans cesse l’excès et la caricature : les comédiens rient fort, ils ont l’ironie gouailleuse, le geste vif et n’ont jamais peur de faire des grimaces. Dans cette nouvelle version, ils chantent également et on les voit intervertir leurs roles aussi rapidement que sur un ring.
Parmi ces joyeux drilles l’on remarque la force tranquille et l’oeil rieur de Philippe Perrussel, la moue infantile et la diction insistante de Bertrand Mounier, l’élégance timide de Pierre Ellie qui joue les poltrons et les maris cocus, sans oublier l’air penaud mais adorable d’Etienne Launay (qui vient, par ailleurs, de mettre en scène au Lucernaire une pièce d’Harold Pinter : le Monte-Plats). Côté donzelles, la comédienne Isabelle de Botton mène la danse avec son inégalable autodérision : jouant paillardement les ivrognes ou les bonnes, elle entraîne dans son sillage la jeune Salomé Villiers qui interprète sans distinction les épouses volages en bas-résilles ou les maîtresses de maison en lavallière
Même si le spectacle part parfois dans tous les sens, l’on aime assez cette succession désordonnée de saynètes à l’humour vieillot et moqueur. Certes le verbe de Courteline est un peu désuet, les blagues ne sont plus aussi percutantes qu’à l’époque, mais c’est justement ce qui fait son charme : qui nous parle encore de « galapiat » ou de « saligaud » en date aujourd’hui ? Personne !
Si cette écriture caustique et pittoresque vous inspire, allez donc vous acoquiner au Lucernaire. Vous y retrouverez la philosophie légère et débridée d’un auteur qui a trop vite disparu des scènes théâtrales : Georges Courteline.
L’affaire Courteline
Sept pièces courtes de Georges Courteline
Mise en scène : Bertrand Mounier
Collaboration artistique : François Nambot
Avec Isabelle de Botton, Salomé Villiers ou Raphaëlle Lemann, Étienne Launay, Pierre Hélie, Philippe Perrussel, Bertrand Mounier ou François Nambot
Théâtre du Lucernaire
53, rue Notre-Dame-des Champs
Paris 6e
Réservation : 0145445734
http://www.lucernaire.fr
Jusqu’au 6 mai 2018
Du mardi au samedi à 19h
Le dimanche à 16h
L’Affaire Courteline – Article SYMA News – Florence Yeremian
Photos ©Franck Harscouët