Garden Party : un délire aristo-punk
On vous prévient de suite : les comédiens de Garden Party sont de drôles d’oiseaux. Déjantés et sans limite, ils transforment la scène du Theatre Antoine en un véritable cirque et nous livrent un portrait féroce des nouveaux riches et des aristos.
Portrait burlesque de mondains à la dérive
Tout débute au milieu d’un jardin où paradent huit mondains en tenue de soirée. Pour accompagner ces messieurs-dames dans leurs ébats, l’on distingue un majordome, une plante verte, des bouteilles de champagne et une grosse poubelle. En guise de fond sonore, on entend en alternance le Rêve Bleu de Walt Disney, un poème de Robert Burns ou les Walkyries de Wagner… Vous l’avez compris, on gambade en terrain burlesque.
Semblables à des enfants gâtés, ces aristocrates mettent à exécution tout ce qui leur passe par la tête : ils boivent, dansent, se culbutent les uns les autres ou se tirent dessus. Privilège des bien nantis, ils ne se soucient jamais des conséquences de leurs actes et poussent leurs jeux jusqu’à la cruauté.
Un spectacle en borborygmes ? C’est possible !
Mis en scène par Alexandre Pavlata, ce spectacle a une particularité : il est joué en borborygmes ! À part quelques mots clefs et idéophones, aucune phrase n’est prononcée du début à la fin de la pièce. Tout repose sur des bruits, des mimiques, des onomatopées et même des postillons.
Au premier abord, on est surpris par cette approche théâtrale, voire réticents, puis on s’adapte à ces bafouillis et l’on se laisse porter en riant de bon cœur : ça marmonnent, ça baragouine, ça coasse, ça couine… mais, étonnement, on comprend tout à ce drôle de show et on a envie de voir jusqu’où ces doux-dingues vont nous mener.
Une sacrée Compagnie !
Il faut dire que les comédiens de la Compagnie 8 n’ont pas peur du ridicule et ils poussent très loin la caricature des mondains : les yeux exorbités, la bouche tordue ou les fesses à l’air, ils se contorsionnent, rotent, volent au dessus des spectateurs et semblent tout droit sortis d’un zoo ou d’un dessin animé.
L’air de rien, ces mal élevés proposent un très beau travail de groupe où tout s’enchaine avec autant de cohésion que d’harmonie. Parmi eux, la comédienne Charlotte Saliou se distingue également par ses talents de chanteuse lyrique et son degré de folie qui atteint des sommets.
Entre rire et cruauté
À mi-chemin entre le comique de Tex Avery et les grimaces de Jerry Lewis, Garden Party nous livre une partition hautaine et décadente qui va cependant tourner graduellement au tragique. En effet, derrière l’humour et la caricature de la haute société se dresse une certaine réalité.
C’est avec beaucoup de sarcasme qu’Alexandre Pavlata croque l’arrogance et la bêtise des amateurs de rallyes, des nouveaux riches et des héritiers fortunés. Singeant leur snobisme et leur hypocrisie, il montre à quel point cette jeunesse dorée s’ennuie et tente de meubler son existence avec des bagatelles, du champagne et des petits fours. Si la plupart des soirées peuvent commencer sagement par des politesses et des parties de colin-maillard, chacun sait qu’elles se finissent régulièrement en beuverie ou en capharnaüm d’où certains ne ressortent pas indemnes.
C’est donc un vrai théâtre de la cruauté que nous offre ce metteur en scène d’origine tchèque. Derrière l’apparence absurde de sa pièce, il nous questionne subtilement sur l’inconscience et la superficialité de notre société. On aime ou on déteste mais on ne reste pas indifférents.
Garden Party ? Un spectacle dingue et inattendu, à la lisière du rire et de la cruauté.
Garden Party – PDF SYMA News – Florence Yeremian
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Garden Party
Un délire aristo-punk
Auteur et metteur en scène : Alexandre Pavlata
Avec la compagnie n°8 : Stefania Brannetti, Benjamin Bernard, Gregory Corre, Matthieu Lemeunier, Fabrice Peineau, Susan Redmond, Hélène Risterucci, Fredéric Ruiz et Charlotte Saliou.
Théâtre Antoine
14 boulevard de Strasbourg
Paris 10e
Réservations : 0142087771
À partir du 6 février 2019
Du mercredi au samedi à 19h
Le délire dure 1h10
Photos : ©Gilles Rammant et ©Yann Orhan