Le canard à l’orange
Hugh et Liz sont mariés depuis 15 ans. Face à la routine qui s’est installée et aux tromperies de son époux, Liz s’entiche d’un certain John Brownlow et s’apprête à quitter le domicile conjugal. Contre toute attente, son mari décide de la jouer fairplay et lui propose d’inviter cet amant à la maison pour le weekend. Afin d’agrémenter cette petite sauterie, il convie également Pat, sa ravissante secrétaire et demande à Mlle Grey, sa vieille gouvernante de leur préparer … un canard à l’orange.
Un grand classique du Boulevard
Depuis 1979 et au fil de ses représentations, Le Canard à l’orange est devenu un grand classique théâtral. Entre un mari trompé, une femme inconstante, un amant stupide et une secrétaire sexy, il faut dire que tous les éléments du boulevard sont réunis pour mener la danse.
Mise en scène par le talentueux Nicolas Briançon (Hard – Voyages avec ma tante), cette comédie prend place en Angleterre dans une maison cossue : canapé Chesterfield, lourde bibliothèque et musique jazzy font donc partie du beau décor signé Jean Haas. Malgré cette atmosphère très Britannique, la pièce cultive la légèreté et l’insouciance d’un vaudeville régulièrement secoué par les apparitions d’une gouvernante des plus acariâtres (excellente Sophie Artur)
Un sympathique casting
À la fois fanfaron et manipulateur, Nicolas Briançon met en scène et jongle allègrement avec le personnage du mari. Très à l’aise dans ce rôle à l’humour British, il adopte un profil flegmatique qu’il ponctue de bons mots, de whisky et d’une pointe de sarcasme. Tout est joué en souplesse avec intelligence à l’exemple de Hugh qui semble prendre son cocufiage avec philosophie mais va tout faire pour récupérer sa femme.
Cette dernière est interprété par Anne Charier qui nous livre une bourgeoise confortablement installée dans ses robes de chambres et son jardin fleuri. Jouant la carte de l’inconstance et de la fragilité, la comédienne incarne une épouse d’un autre temps qui certes correspond à la protagoniste de la pièce mais manque de caractère pour une femme d’aujourd’hui. On la voudrait moins cruche, plus impétueuse, moins soumise également à cet asservissant destin d’épouse.
La secrétaire Patty Pat est justement là pour contrebalancer cette docilité. Créature au regard coquin et aux jambes de rêve, elle séduit la galerie tout en menant sa barque. Ne vous fiez pas à ses ondulations et ses affriolants déhanchés, cette Patty est ce qu’on appelle une belle arriviste et son interprète, Alice Dufour, une délicieuse actrice.
Reste enfin l’amant, incarné par l’irrésistible François Vincentelli. Accentuant le côté niaiseux de son protagoniste, il nous offre un bellâtre Belge à l’accent aussi prononcé que sa bêtise. Paré d’un nœud papillon rose et d’un costume prince-de-galles un peu étroit, il bêle, roule des épaules et se fait candidement mener par son rival, le mari de Liz. Pour ceux qui ont déjà vu François Vincentelli interpréter Roy Lapoutre dans le décapent Hard (également mis en scène par Nicolas Briançon), ils savent que ce comédien n’a peur de rien quand il s’agit de faire rire. A l’exemple de son précédent personnage, on aimerait le voir pousser d’avantage l’idiotie et la lubricité de John.
Un canard trop confit
Il en va d’ailleurs ainsi de toute la pièce. Aussi amusant soit-il, ce Canard à l’orange a pris un petit coup de vieux. Comparativement aux comédies d’aujourd’hui, son rythme est plutôt lent, les reparties de ses personnages sont prévisibles, quant au scénario, il ne comporte pas beaucoup de surprise.
Pour réactualiser ce vaudeville des années 80, il faudrait lui insuffler de l’audace, dépoussiérer son texte et moderniser ses protagonistes. Pourquoi ne pas rendre l’épouse plus coriace, la secrétaire nymphomane, l’amant totalement déjanté et le mari un brin pervers ? Cela donnerait du peps à la pièce et une nouvelle saveur au canard !
En gros, le canard doit rester au menu mais il faut changer la recette …
Moins audacieux que Hard, moins délicieux que Voyages avec ma tante, ce canard un peu désuet nous fait néanmoins passer un agréable moment.
Le Canard a? l’orange – PDF SYMA News – Florence Yeremian
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Le canard à l’orange
Une pièce de Douglas Home
Mise en scène Nicolas Briançon
Adaptation : Marc-Gilbert Sauvajon
Avec Anne Charrier, Nicolas Briançon, François Vincentelli, Alice Dufour et Sophie
Théâtre de la Michodière
4 bis, rue de la Michodière – Paris 2e
Réservation : 0147429522
www.michodiere.com
A partir du 22 janvier 2019
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Photos : ©Céline Nieszawer