Le Greco, peintre visionnaire du XVIIe siècle
Apres l’exposition consacrée à Toulouse Lautrec, le Grand Palais, nous propose une rencontre avec le Greco afin de nous faire capter la modernité de ce prophète artistique. Audacieux, obstiné et possédant une sensibilité particulière, ce peintre visionnaire du XVIIe siècle a réussi à s’élever parmi les grandes figures de la Renaissance et à influencer nombres d’artistes modernes et contemporains.
De la Grèce à l’Italie
Le Greco est une figure particulière du monde de l’art. Né en Crête sous le nom de Domenikos Theotokopoulos, il s’est initialement consacré à la peinture d’icônes et de panneaux de dévotion. Travaillant sur bois dans la pure tradition byzantine, il a réalisé des œuvres essentiellement religieuses ne laissant pas encore prévoir l’évolution de son art et de sa palette. Parmi les quelques pièces de l’exposition témoignant de sa première période, la plupart viennent justement d’institutions grecques à l’exemple du Musée Benaki ou de la Pinacothèque d’Athènes. On peut y discerner une inspiration italienne mais ses personnages sont encore emprunts d’une certaine rigidité. Tout cela va évoluer avec son départ pour Venise…
La Sérénissime
En 1567, Le Greco débarque à la Cité des Doges. Du haut de ses 26 ans, ce jeune étranger peine à se faire une place mais il en profite pour découvrir l’art du Titien, la dynamique de Tintoret et les clairs-obscurs de Bassano.
Apprenant la grammaire de la Renaissance, son écriture se fait peu à peu vénitienne : couleurs, faste, chatoiement des tissus… Le Greco libère son pinceau et accentue sa palette avant de partir pour Rome où il espère trouver un meilleur accueil…
Rome et Religion
Comme il ne maîtrise pas la fresque, Le Greco n’a pas accès aux grandes commandes et doit se contenter de peindre des petits tableaux de dévotion. Sa période romaine se consacre ainsi essentiellement à un art religieux, néanmoins le talent de portraitiste du Greco commence à se faire connaître et grâce à sa fréquentation des cercles humanistes, sa réputation se forge.
Un grand portraitiste
À côté de ses saints, ses Adorations et ses Christ en croix, Le Greco met donc en images la société humaniste qu’il côtoie : architectes, sculpteurs, hommes de lettre… De nombreux Romains posent pour lui jusqu’à son départ pour l’Espagne où il réalise l’étonnant portrait du Cardinal Nino de Guevara, grand inquisiteur.
Le Greco s’installe à Tolède
Entre les panneaux pour la cathédrale de Tolède et les tableaux pour le Roi Philippe II, le style si particulier du Greco parvient enfin à se propager en Castille. Maître d’un atelier, il peut à présent pleinement se consacrer à son art et imposer ses propres canons.
Une fabuleuse liberté stylistique
La particularité du Greco réside dans la grande force plastique de sa peinture : grâce à sa touche enlevée et à sa maîtrise des couleurs, ce peintre parvient à créer des silhouettes puissantes et distordues qui semblent être en mouvement perpétuel.
Allant au-delà des apparences, Le Greco ne cherche pas à copier le réel, il pousse plus loin. Comme le dit Guillaume Kientz le commissaire de l’exposition : « Son art est performatif car Le Greco est dans l’outre-peinture ». En effet, l’artiste intègre un souffle, un imaginaire et une sensibilité qui sont bien en avance sur son temps.
En cela, ce peintre de la Renaissance est un véritable précurseur car il ne se contente pas de reproduire académiquement le monde qui l’entoure. À l’exemple des artistes modernes du XXe siècle, il interprète ce qu’il voit, le transforme et va jusqu’à travailler de façon sérielle sur le même personnage ou le même motif !
.