Lee Sekyung est l’une des artistes les plus originales d’Art Paris 2023 et pourtant l’une des plus discrètes. Céramiste de formation, cette coréenne utilise le cheveu humain pour réaliser l’ensemble de ses oeuvres. Qu’il s’agisse d’une reproduction sur porcelaine ou d’un dessin sur toile, les compositions de Lee Sekyung font preuve d’une dextérité et d’un savoir-faire si singulier qu’elles intriguent l’ensemble des visiteurs. Surtout ne la ratez pas, elle est représentée par la Simon Gallery.
Quand le cheveu devient ligne
Lee Sekyung est originaire de Corée du Sud où elle a fait des études en tant que céramiste. La particularité de cette artiste est d’utiliser le cheveu humain pour ses compositions: qu’il s’agisse d’assiettes, de verres ou de carreaux de faïence, elle crée des motifs floraux ou géométriques en collant un par un des cheveux pour tracer son dessin.
Avec une minutie et une dextérité impressionnante, elle soumet l’élément capillaire qui devient pigment et donne naissance au trait. Progressant à la vitesse d’un millimètre par heure, Lee Sekyung s’attelle ligne par ligne, à saisir les cheveux, les placer et les coller afin de voir émerger une oeuvre emprunte à la fois de délicatesse et d’une patience infinie.
Un travail entre orient et occident
Son inspiration est variable selon les supports : l’artiste peut ainsi reconstituer toutes les pièces de porcelaine d’un service chinois, reprendre sur assiette les motifs des constructivistes soviétiques, travailler avec des pièces brisées en mode kintsugi ou copier sur carreaux des scènes de genre du XVIIe siècle flamand.
En ce qui concerne ses créations plus personnelles, Lee Sekyung se complait à décliner des lignes parallèles qui provoquent d’agréables illusions d’optique : entre création 3D et carte topographique, le spectateur a l’impression de voir sortir de la toile de fins paysages de dunes ou de petites vagues tracées en filigrane.
Afin d’apporter une note chromatique à ses créations, Lee Sekyung colore parfois ses éléments capillaires en rouge ou bleu mais les dégradés sont très complexes à réaliser sur les cheveux humains.
Art sacré ou Art profane ?
Par-delà l’utilisation de cette technique capillaire fort singulière, le travail de Lee Sekyung présente un aspect presque métaphysique. En effet, lorsque l’on y réfléchit, le cheveu est un matériau qui possède ad vitam aeternam l’ADN de son propriétaire : entre résidu humain et matière morte, ce cheveu peut donc continuer son existence propre, ce qui confère aux oeuvres de Lee Sekyung une touche surréaliste qui frôle le domaine du sacré. En poussant plus loin, on peut même y voir une allusion aux reliquaires médiévaux qui abritaient jadis les restes des Saints parmi lesquels figuraient régulièrement les mèches de cheveux.
Lee Sekyung est consciente de cette dimension à mi-chemin entre l’art sacré et l’art profane. Elle s’en amuse subtilement en proposant des oeuvres plus ludiques où les cheveux perdent leur parfait agencement et s’effilochent au creux de ses assiettes afin de donner l’illusion de pouvoir y pousser !
Entre humour et illusion, entre tradition et modernité, l’art de cette talentueuse coréenne nous invite à l’émerveillement mais aussi à réfléchir au processus de création et à la temporalité d’une oeuvre.
Lee Sekyung ? Une artiste à surveiller de très très près !
Florence Gopikian Yérémian – florence.yeremian@symanews.fr
Lee Sekyung
Art Paris 2023
Le travail de Lee Sekyung est représenté par la Gallery Simon – Séoul
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