Serge Krewiss : l’Art mis en bouteilles
Serge Krewiss est un artiste qui se plaît à décliner les bouteilles d’eau sous toutes leurs formes. Amoureux des reflets et des transparences, il confère à ces objets du quotidien des sentiments, pour ne pas dire une âme, et s’amuse à leur faire revisiter les classiques de la peinture. Entre une Madone en majesté, un remake de La Cène et une version plastique des Trois Grâces de Raphaël, son exploration nous entraine avec autant d’humour que de talent dans un monde aqueux et surréaliste.
Florence Gopikian Yérémian : Comment est née la thématique des bouteilles dans votre parcours pictural ?
Serge Krewiss : Il y a une dizaine d’années, je cherchais à maîtriser la transparence et je me suis mis à peindre une carafe d’eau. Très vite mon esprit s’est ennuyé et mon regard s’est porté sur une bouteille d’Hépar qui se trouvait à proximité. Mon pinceau a alors commencé à l’explorer et il ne s’est plus arrêté : cela fait 8 ans que je peins des bouteilles en plastique ! Cet objet quotidien peut sembler banal et anodin mais il regroupe en lui seul toutes les difficultés que l’on peut rencontrer en peinture à l’huile : le dessin, la lumière et la transparence.
Votre approche du « sujet » a néanmoins évoluée
Absolument. Au départ je faisais des natures mortes autour de bouteilles-objets placées au centre de la toile à l’exemple d’un crâne au sein d’une vanité ou d’un pot d’un fleur. Quand j’ai su parfaitement peindre une bouteille, j’ai commencé à la froisser, à la tordre et, peu à peu, j’y ai décerné des formes humaines. Un immense champ des possibles s’est alors ouvert à moi et j’ai commencé à créer des scènes de vie et à revisiter des œuvres d’art. J’ai, par exemple, repris le thème des Trois Grâces de Raphaël, celui des Bourgeois de Calais de Rodin puis j’ai composé des Pietà, des scènes bibliques ou des Madones en majesté. J’envisage actuellement une réinterprétation du Déjeuner sur l’herbe de Manet ainsi qu’une variation autour des Demoiselles d’Avignon.
En fait, vous personnifiez vos bouteilles ?
Exactement. J’aime l’idée de donner des sentiments à un objet, de lui conférer des expressions. J’ai toute une série autour de la danse et je suis très sensible à la tendresse des couples et particulièrement à celle qui émane des personnes âgées. Ce qui est amusant c’est que très souvent le public se projette dans mes œuvres, ce qui permet d’avoir plusieurs degrés de lecture : on peut y voir la « bouteille-objet », le personnage « mis en bouteille » et certains y discernent aussi des métaphores de la nature soumise au monde du plastique et donc une critique de la pollution de la planète et de ses rivières.
Vous êtes également historien d’art, quels sont les peintres qui vous ont influencé notamment dans cette recherche des reflets ou dans cette avancée vers des natures mortes très contemporaines ?
J’aime l’art de Lucian Freud, les œuvres d’Egon Schiele et celles du Greco. Parmi mes acolytes, j’apprécie énormément l’américain Shane Wolf avec qui j’ai pris des cours ainsi que Peter Klasen dont je suis le travail depuis des années. Cet artiste allemand met en image un art industriel fait de machines et de tuyaux. Lors d’une de ses précédentes expositions, il s’est exprimé ainsi « Je suis là pour sublimer l’hostilité extérieure ». J’aime beaucoup cette idée. Je trouve qu’elle correspond également à ma démarche artistique.
Vous venez d’exposer à la Mairie du Ve arrondissement aux côtés des sculptures de PICO , quelle va-t-être votre prochaine actualité ?
Je serai au Salon d’Arts Contemporains de la Roche-sur-Yon (le S.A.C.R.E) du 1er au 4 juin avant de partir exposer en Andalousie dans la vallée de Rodalquilar.
Florence Gopikian Yérémian – florence.yeremian@symanews.fr
Serge Krewiss
Du 1er au 4 juin
Le S.A.C.R.E – Salon d’Arts Contemporains
Haras de la Vendée – La Roche-sur-Yon
Inauguration le 17 juin 2023:
Rodalquil Arte
Andalousie – Espagne
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