Jean-François Spricigo : un univers photographique entre quiétude et inquiétude
Pour cette nouvelle exposition, Jean-François Spricigo nous fait voyager de la Guyane au Canada en faisant escale à Mayotte ou en Normandie. Grand maître du noir et blanc, ce talentueux photographe s’autorise quelques clichés aux teintes ocres ou sépia mais son travail nous plonge pour l’essentiel dans le silence d’un univers achromatique.
Amoureux de la nature et des êtres qui la parcourent, Jean-François Spricigo aime se poser en observateur du monde animalier et attendre avec calme le moment opportun pour en retranscrire le souffle et les palpitations. Au fil de rencontres improbables, son objectif se délecte ainsi à capturer la silhouette spectrale d’un jeune singe-écureuil ou l’œil tourbillonnant d’un loup grattant la terre. C’est à la fois beau et inquiétant, peuplé d’impressions tendres et sauvages qui hypnotisent le spectateur.
Ce contraste entre le réel et l’imaginaire est omniprésent dans le travail poétique de Jean-François Spricigo. On peut le percevoir au sein d’une de ses compositions confrontant la silhouette floutée d’une femme à celle d’un cerf majestueux, ou dans un cliché longiligne capturant un petit maki dans sa course folle. On retrouve également cette atmosphère onirique dans sa photo Alice sur laquelle se dessine le profil d’une enfant cheminant seule au cœur d’une forêt crépusculaire. En regardant cette obscure clarté, on se dit que l’écriture photographique de cet artiste possède un calme tumultueux qui vient sournoisement perturber nos inconscients.
Lorsque l’on caresse des yeux les tirages sur papier japonais de cet artiste singulier, on est effectivement happé par la quiétude et le mystère qui s’en dégagent. Qu’il s’agisse d’une île dormant dans la brume ou d’un halo céleste illuminant le sentier d’un ours, l’on se demande si c’est un songe ou si nous sommes éveillés car tout nous invite au rêve et à la contemplation.
Ce monde qui parait étrange et si lointain est pourtant bien le nôtre. Seul le regard intuitif de Jean-François Spricigo le perçoit sous cet angle fait d’intensité et d’élégance car son âme avide de sensations parvient à capter le visible autant que l’invisible. Il en va ainsi de cette sublime silhouette diaphane et épurée d’une vache corse ou de ce jeune faon reposant délicatement parmi des arbres menaçants : apparition ou réalité ? À vous d’en juger…
Florence Gopikian Yérémian – florence.yeremian@symanews.fr
Jean-François Spricigo : Le vent se lève
Exposition du 7 septembre au 9 novembre 2024
Galerie Camera Obscura
268, boulevard Raspail – Paris 14e